lundi 13 novembre 2006

Rapport de présentation du TPFE :

ESPACES DE RENCONTRE AVEC L’ART CONTEMPORAIN

1. ANALYSE DU THEME ET DU CHAMP D’INTERVENTION
1.1 RUPTURE AVEC L’HISTOIRE DE L’ART
1.1.1 Naissance de l’art contemporain
1.1.2 L’art contemporain créera peut être l’histoire de l’art
1.2 RUPTURE ESTHETIQUE AU PROFIT DE NOUVEAU AXIOMES
1.2.1 Rupture avec l’idée du Beau
1.2.2 Primauté du sens et des sensations
1.2.3 Primauté de l’emballage muséal : une architecture de l’esthétisme
1.2.4 Rupture avec l’illusion de l’évidence
1.2.5 Primauté du didactisme pour les scénographes d’exposition
1.3 RUPTURE AVEC L’ILLUSION D’ETERNITE DES OEUVRES
1.3.1 Un art éphémère
1.3.2 Un art expérimental, donc pour une durée spécifique
1.3.2 La difficulté d’exposer des expérimentations
1.4 RUPTURE AVEC L’ILLUSION D’UBIQUITE
1.4.1 Un art de musée
1.4.2 La neutralité des espaces muséaux
1.4.3 L’exposition comme œuvre

2. ANALYSE DU CONTEXTE PHYSIQUE ET SOCIAL DU PROJET
2.1 SITUATION GEOGRAPHIQUE DES LIEUX D’EXPOSITION D’ART CONTEMPORAIN
2.1.1 Les grandes institutions muséales
2.1.2 Les centres d’art contemporain
2.1.3 Les galeries d’art contemporain
2.1.4 Les FRAC
2.2 ASPECTS SOCIOLOGIQUES DES LIEUX D’EXPOSITION D’ART CONTEMPORAIN
2.1.1 Qui fréquentent ces lieux d’exposition ?
2.1.2 Pourquoi le public visite-t-il ces lieux d’exposition ?
2.1.3 Comment le public visite-t-il ces lieux d’exposition ?
2.1.4 Quels sont les facteurs qui empêchent la rencontre entre le public et l’art contemporain ?

3. PROGRAMME – JUSTIFICATION – ASPECTS HISTORIQUES, ECONOMIQUES ET REGLEMENTAIRES
3.1 PROGRAMME/ JUSTIFICATIONS
3.1.1 Pourquoi une installation mobile ?
3.1.2 Pourquoi l’installation sera de taille moyenne ?
3.1.3 Pourquoi s’installer dans des villes aux populations inférieures à 50 000 habitants ?
3.1.2 Quels seront les espaces proposés par la structure ?
3.2 ASPECTS HISTORIQUE ET ECONOMIQUE DES LIEUX D’EXPOSITION MOBILES
3.2.1 Aspects historique de l’architecture mobile
3.2.2 Aspects économiques des lieux d’exposition d’art contemporain mobiles
3.3 ASPECTS REGLEMENTAIRES D’UN LIEU D’EXPOSITION PUBLIC MOBILE
3.3.1 Réglementation concernant les ERP provisoire
3.3.2 Implantation du lieu d’exposition éphémère : la place publique ou le stade

4. ORIENTATIONS DU TRAVAIL - CHOIX ARCHITECTURAUX – ALTERNATIVES
4 .1 CONCEPTS/ CHOIX ARCHITECTURAUX
4.1.1 Réinterprétation du parcours

5. ELEMENTS GRAPHIQUES – FONDS DE PLAN, SITE – CARNET D’ETUDES



1. ANALYSE DU THEME ET DU CHAMP D’INTERVENTION


L'art est constitutif de l'identité Humaine, il participe à l'éclaircissement de ses désirs, de ses angoisses, de ses projets, de ses évolutions. Il est peut être bien, comme l'a dit Robert Filliou, ce qui rend la vie plus intéressante que l'art. .
L’architecture est l’art de bâtir des édifices en fonction des besoins des usagers. Pour ce projet, il est donc essentiel de chercher, en premier lieu, les desseins de l’art contemporain afin de réfléchir à la conception des espaces l’accueillant. Je m’attellerai donc à analyser ce qu’est le contenu afin de concevoir le contenant approprié. De mon mémoire de 5ème année intitulé « Quels espaces pour l’art contemporain ? », je dégagerai les axiomes principaux caractérisant l’art contemporain et analyserai les caractéristiques des différentes institutions muséeales actuelles afin de poser les objectifs concernant mon projet.


1.1 RUPTURE AVEC L’HISTOIRE DE L’ART

1.1.1 Naissance de l’art contemporain
L'art contemporain est un terme utilisé pour désigner l'ensemble de la production artistique de la seconde moitié du 20ème siècle. Il est difficile de situer chronologiquement la naissance de l'âge contemporain, mais ce qui est certain, c'est qu'il prend ses racines dans l'art moderne dont il est l'héritier direct. En cela, il est possible de considérer que l'art contemporain s'affirme réellement en tant que tel, au début des années 60, bien que l'on puisse déjà auparavant percevoir des signes annonciateurs de l'âge contemporain. Dès le début du 20ème siècle, Georges Braque et Pablo Picasso intègrent des corps étrangers à la peinture, faisant ainsi exploser le cadre classique. Mais c'est sans conteste Marcel Duchamp qui est le véritable précurseur et (par la suite) inspirateur des avant-gardes modernes. En effet, ses premiers ready-made sont une remise en question de l'idée même de l'art tel qu'il est alors perçu.

On peut donc dire que l’art contemporain est un type d’art qu’on ne peut assimiler totalement à aucun des mouvements et courants antérieurs à la modernité, ou aux avant-gardes de la fin des années 60. En effet, l’art qui s’impose, depuis les années 80, sous le qualificatif de « contemporain », tente de se définir sans référence explicite au passé. De plus, tous les artistes en activité ne sont pas non plus nécessairement considérés comme des artistes contemporains dès lors que leur œuvre entretient une relation formelle, stylistique ou technique avec le passé, même récent.

1.1.2 L’art contemporain créera peut être l’histoire de l’art
De l’étude approfondie de quelques « musées d’art contemporain », j’ai tiré les conclusions suivantes :

- Un musée d’art contemporain constitue un paradoxe puisqu’un musée a pour fonction de présenter l’histoire de l’art alors que l’art contemporain est, par définition, l'art en train de se faire, "l'art synchronisé avec le moment ultime de l'avancée du temps". Il ne peut, par conséquent, se limiter à un état défini puisqu’il s'inscrit continuellement dans le présent.

- Les importantes institutions muséales contemporaines à ce jour, tel que le Centre George Pompidou, à de rares exceptions près, sont devenus le lieu de célébration consensuelle des stars nationales déjà consacrés, quand il ne se transforme pas en showroom pour tel architecte ou designer passé maître dans l’art de l’autopromotion. Parallèlement, les générations émergentes d’artistes ne sont pas soutenues comme il se doit par ces centres qui choisissent d’exposer les valeurs reconnues par le marché. En ce qui concerne la place de la création contemporaine, elle est incontestablement réduite par ces institutions qui privilégient l’assurance d’un succès aux conséquences lucratives au profit de choix plus audacieux, peut-être moins rentables.

Il est donc nécessaire d’apporter des précisions quant à l’art contemporain que je souhaite exposer dans ce projet. Selon moi, les institutions muséales citées ci-dessus sont devenus des musées d’art moderne qui répertorient l’art du siècle passé et non des centres d’art contemporain qui participent à la création artistique actuelle.

Dans ce projet je souhaite exposer la création artistique actuelle qui apporte quelque chose à l’histoire, en mettant tout en œuvre non pas pour commémorer ce qui fut mais pour assurer que « ça » continue, que l’effet de l’art demeure.
Il ne s’agit donc pas d'œuvres regroupées sur la base de leur seul caractère de contemporanéité. Il s’agit, ici, d’exposer l’art ni ancien, ni nouveau mais vivant. Les espaces que je proposerais auront pour objectifs d’inviter le visiteur non pas à constater ce qui a été, mais à voir et à vivre l’effet de l’œuvre sur le présent.
L’art contemporain, art en perpétuel remise en question puisque inscrit dans le présent, ne peut être exposer dans des musées aux typologies similaires de ceux qui répertorient l’histoire de l’art.

1.2 RUPTURE ESTHETIQUE AU PROFIT DE NOUVEAUX AXIOMES

1.2.1 Rupture avec l’idée du Beau
Une des caractéristiques fortes de l'art contemporain est sa rupture avec la notion d'esthétique. Avec l'art contemporain, l'acception du mot art s'est considérablement élargie. L'art ne relève plus, ou pas seulement, de critères esthétiques, c'est-à-dire d'une recherche du beau. Autrement dit, ce n'est plus une question de formes de contenu, de style, ou de vision de l'artiste. On a beaucoup reproché à l'art contemporain d'avoir détruit le Beau. Mais c'est souvent parce qu'on confond le Beau avec le joli et l'agréable. L'agréable est subjectif, il est affaire de goût. Il est aussi associé à la notion de plaisir. Les artistes contemporains refusent, très souvent d'être associés à une recherche esthétique qui privilégie l'aspect attrayant (belles couleurs, douce lumière, dessin charmant..) aux dépens de la force de l'œuvre d'art (idée, concept, but de l'artiste). Leur grande angoisse est que l'on confonde l'art et le décoratif. Pour l'artiste, l'œuvre exprime ses sensations, sa vérité, ses émotions. Son travail répond à ses exigences propres qui ne sont pas toujours synonymes de confort, de joliesse et d'agrément. L'historien de l'art Edgar Wind le dit abruptement "L'art -regardons les choses en face- est une source de désagrément". Pour le créateur, l'aboutissement n'est pas le tout, le processus créatif entre aussi en jeu. De plus, l’avènement des nouvelles formes d’expression tels que les installations, les performances ou le land art, a perturbé les habitudes visuelles d’un public accoutumé à l’harmonie des peintures et sculptures des siècles précédents. La contemplation n’est plus un des axiomes principaux de l’art contemporain.

1.2.2 Primauté du sens et des sensations
Cette notion découle de l’art conceptuel qui est un mouvement contestataire de la fin des années soixante contre la prédominance de l’objet dans le Pop Art et le Minimal Art. Les artistes adhérents à ce mouvement rejettent l’idée de la matérialisation de l’œuvre par l’artiste. L’art n’est pas un objet. Ces artistes donnent la primauté à l’idée qui précède la réalisation plutôt qu’à l’œuvre réalisée elle-même. Les œuvres réalisées peuvent se limiter à de simples
définitions ou à des textes, elles n’existent comme une chose matérielle, car les mots qui désignent l’idée sont déjà de l’art. A partir de ce mouvement, l’artiste contemporain cherchera toujours à transmettre un message, une idée, « à sentir la vie et à l’exprimer avec ses lunettes à lui ».
Les artistes contemporains questionnent le réel mais ne donnent qu’une indication de réponse à ces interrogations. Leur œuvre est le dispositif qui agit comme stimulus et suscite la réflexion du spectateur. Pour engendrer ce processus de génération de pensées, les artistes créent des œuvres d’art à fort pouvoir émotionnel, c’est par le biais des sensations transmises au public qu’ils expriment leurs propres perceptions du monde. C’est la raison pour laquelle, notamment, les artistes contemporains utilisent des formes nouvelles (la rupture avec les habitudes engendrent plus de réactions) et participatives (les installations contemporaines font souvent appel à l’interactivité) afin d’éveiller d’avantage les sensations du public.

1.2.3 Primauté de l’emballage muséal : une architecture de l’esthétisme

De mon étude sur les musées d’art contemporain, j’ai tiré les conclusions suivantes :
- Au 19ème siècle, l'âge d'or du musée Panthéon, on construisait de véritables palais pour la peinture, avec des enfilades de galeries, un grand vestibule, un escalier d'honneur et les bustes des vénérables ancêtres, tout cela pris dans une architecture monumentale faite pour inspirer le respect et l'admiration. De nos jours, alors même que notre conception de l'art a radicalement changé, l'architecture de musée perpétue cette tradition de Musée-Monument, en évoluant vers l'idée "d'édifice exhibitionniste".

-Les musées d’art contemporain, eux, non pas subi la rupture esthétique qu’a subi l’art actuel. En effet, les architectes de ces musées cherchent à tous prix à renvoyer une « belle » image de leur bâtiment. Pour ce faire, ils utilisent les matériaux les plus nobles et les formes les plus harmonieuses sans se soucier des œuvres contemporaines que ces musées vont accueillir.
Concernant le Musée Guggenheim de Bilbao, par exemple, à l'exception de l'atrium et de quelques salles d'exposition qui expriment de l'intérieur les ondulations et le mouvement de l'extérieur, les autres salles d'exposition auraient pu être conçues il y a cinquante ans ; elles n'ont rien à voir avec le design extérieur. La majorité des aires intérieures ressemblent à tous les musées.

-Cette primauté de l’emballage muséal sur son contenu est par ailleurs relayée par la rivalité existante entre les architectes de musées et les artistes. Cette concurrence est souvent dénoncée par les artistes à l’instar de Daniel Buren en 1971 à l’inauguration du musée Guggenheim de New York. Il dût suspendre une toile immense au cœur de l’atrium du musée en guise de protestation contre l’arrogance de l’architecture muséale incarnée par excellence par Franck Lloyd Wright. Mais sous la pression de Donald Judd et Dan Flavin, l’œuvre fut retirée de l’exposition avant même que celle-ci ne soit ouverte au public
Cette nécessité d’excellence architecturale repose peut être sur le fait que l’édifice muséal s’inscrit lui même dans l’histoire des musées et plus globalement dans l’histoire de l’architecture. Nombres d’architectes concevant leurs projets ont plus pour obsession d’y entrer que de servir les œuvres et les artistes.

1.2.4 Rupture avec l’illusion de l’évidence
Une autre caractéristique de l’art contemporain est de rompre avec l’illusion de l’évidence. Cette illusion, directement issue de la Renaissance, reposait aussi sur le fait que l’œuvre d’art avait un public spécialisé et une destination précise. Au contraire, l’art contemporain repose le plus souvent sur un effet qui est de l’ordre de la sensation pure et de l’immédiateté des significations. Nul besoin, aujourd’hui de connaître l’iconographie attachée à certains personnages antiques ou religieux. Bien sûr, les œuvres contemporaines s’inscrivent toujours dans les limites d’une culture déterminée, mais ce renversement a contraint nombre d’artistes à concevoir différemment leur pratique artistique. L’art contemporain est un art conceptuel : les œuvres se proposent de donner des informations sur le monde sur la subjectivité de l’auteur. De ce fait, l’art contemporain se trouve souvent à la frontière qui sépare l’information de la fiction, frontière entre le documentaire et la mise en abîme de la société.

1.2.5 Primauté du didactisme pour les scénographes d’exposition
La plupart des expositions d’art contemporain s’appui de manière excessive sur le sens des œuvres, le sens de chaque œuvre par rapport à l’ensemble de la production artistique de l’artiste etc.. Les œuvres contemporaines sont trop souvent explicitée par d’innombrables cartels décrivant la vie de l’artiste, la signification précise de telle ou telle pièce. Or, comme je l’ai souligné ci-dessus, le sens des œuvres est principalement transmis par les impressions visuelles du public. Il n’est pas nécessaire, selon moi de connaître parfaitement un artiste pour saisir ce qu’il a voulu exprimer par le biais de son œuvre. En effet, les œuvres fonctionnent quand elles informent la vision. Informer n’est pas ajouter de l’information, mais former, reformer ou transformer la vision. Et la vision n’est pas seulement la perception oculaire mais une forme générale de compréhension.

Un lieu d’exposition de la création artistique actuelle doit subir la rupture esthétique qu’a subi l’art contemporain, il ne doit plus ne relever uniquement de critères esthétiques, c'est-à-dire de la recherche d’une belle architecture de façade. Néanmoins, il est intéressant d’encourager le public à se rendre au musée pour rencontrer les œuvres exposées mais également pour y faire connaissance avec le support architectural. Ce lieu doit participer activement à la transmission des sens et des sensations voulus par les artistes contemporains. Pour ce projet, les espaces d’exposition participeront aux processus de réflexion engendré par les œuvres contemporaines. Bibliothèques et musées, de façon similaire, collectent, préservent et rendent les œuvres accessibles au public. Si la plupart des utilisateurs des bibliothèques savent lire les livres qui s’y trouvent, nombreux sont les visiteurs de musée qui ne savent pas voir les œuvres comme elles devraient l'être. Même s'il ne peut instantanément fournir l'expérience et la compétence nécessaire, je m’attellerai dans ce projet à trouver les moyens d'encourager leur acquisition.


1.3 RUPTURE AVEC L’ILLUSION D’ETERNITE DES OEUVRES

1.3.1 Un art éphémère
L’une des spécificités de l’art contemporain est d’avoir mis fin à l’illusion d’éternité des œuvres. Celle-ci indiquait qu’une œuvre était à la fois ce qui transcendait l’histoire et caractérisait un moment de l’histoire (histoire de l’art ou histoire tout court). Or l’art contemporain est non seulement éphémère, fragile, mais de surcroît il se transforme à mesure que le temps passe. Les matériaux mêmes qu’emploient les artistes contemporains sont souvent périssables, s’autodétruisent lentement.
On vit encore avec le lieu commun de l'œuvre d'art qui dure des siècles, voire des millénaires. La statue d'Aphrodite, la Joconde, Guernica, des dizaines de milliers d'œuvres qui ont défié le temps et s'entassent dans les musées, semblent faites pour l'éternité. Mais des œuvres d'art contemporaines surprennent par leur fragilité : collages qui ne tiennent pas, dessins au feutre qui s'effacent à la lumière, négatifs qui s'altèrent. A partir de cette opposition du solide et du fragile, on voit se profiler une mutation du stable au fugace, du durable à l'éphémère.

1.3.2 Un art expérimental, donc pour une durée spécifique
De nombreux processus de création font intervenir la durée comme matière même de l'œuvre : l'art vidéo, la performance, une peinture destinée à s’autodétruire ...). Certaines œuvres peuvent être alors assimilées à la musique : un musicien peut jouer tous les soirs le même morceau. Pourtant, chaque représentation est différente. Cette comparaison insiste sur la facture, l'exécution, plutôt sur le résultat.
Un exemple :
En projetant l'ombre d'une chaise ou d'une table sur le mur blanc de la galerie ou du centre d'art, Eric Snell réalise des dessins saisissants d'objets, à une échelle nettement plus grande que la normale et à l'envers: l'ombre démesurée de l'objet donne lieu à un dessin conçu à partir du bois brûlé d'une partie de la table ou de la chaise. Avec le charbon obtenu, parfois encore fumant, il trace un double de l'ombre sur la paroi. Pour ses titres et ses explications, il emprunte au mythe du Phénix, cet oiseau fabuleux de la mythologie égyptienne qui se brûlait lui-même sur un bûcher et renaissait de ses cendres. Avec cette manière de faire, on touche à l'idée de métamorphose : la chaise devient ombre, l'objet réel se transforme en signe, par le feu. Eric Snell utilise des forces élémentaires, il engage sa force physique, son habilité, dans l'élaboration des dessins muraux : sa performance renvoie à une longue tradition. Mais, l'exposition terminée, la trace sur le mur est volontairement effacée : l'œuvre a une durée éphémère par la volonté de l’artiste; cependant elle peut être redessinée ailleurs.
Dans ce cas, l'œuvre n'est pas réalisée à l'atelier : on a affaire à une œuvres in situ. L'artiste arrive dans la galerie ou le centre d'art, dispose de matériaux ou de matériel, réalise la mise en œuvre d'un projet. Ce qui est l'œuvre d'art c’est la durée pendant laquelle s’effectue le geste de l’artiste.

1.3.2 La difficulté d’exposer des expérimentations
L’art contemporain est donc un art qui prend en compte la notion de durée. Exposer l’instabilité dans une structure pérenne semble être paradoxal. De l’exemple d’Eric Snell, on peut constater que son art est immatériel puisque c’est le processus de création qui constitue l’œuvre d’art. Les repères relatifs à la transmission matérielle d'un patrimoine aux générations futures sont donc mis à mal. Il faut repenser la manière d’exposer ces oeuvres immatérielles puisque qu’elles sont plus constituées par l’idée que par l’objet physique.
De plus un autre problème se pose. Les artistes contemporains élaborent des travaux qui de par leur nature (installations in situ ou œuvres éphémères) les empêchent souvent de fonctionner efficacement dans le système marchand : comment acheter une peinture destinée à s’auto-détruire ? Une performance où des touristes japonais égarés jouent les rôles principaux ?. Ces œuvres n’appartenant plus aux systèmes marchands ont-elle véritablement leur place dans un musée ?


1.4 RUPTURE AVEC L’ILLUSION D’UBIQUITE


1.4.1 Un art de musée
L’art contemporain met fin à l’illusion d’ubiquité qui voulait qu’une œuvre soit toujours identique quel que fut le lieu où elle était présentée. Un tableau de la Renaissance prendra toute son ampleur dans une riche villa mais le sens de la scène représentée et l’impact des couleurs sera identique dans une galerie sans prestige. Désormais, nombres d’œuvres de l’art contemporain, notamment les performances ou les installations, refusent ce diktat ; beaucoup sont produites pour un lieu précis où, au contraire, nient l’idée d’unicité en devenant multiples. L’art est dès lors indexé à un espace de présentation, que ce lieu soit un lieu d’exposition fermé (pour les installations), une boutique (pour les reproductions ou les lithographies), la rue (pour les fresques ou graffiti) ou encore la nature (pour le land art).
Comme je l’ai souligné dans le 1.1.2, « musée » et « art contemporain » seraient deux thermes qui tendraient à s’opposer. La contradiction vient de ce que cet espace, dans la mesure où il est le lieu d’expression de l’actualité, peut être un lieu de contestation du système, mais en même temps, du fait que cette contestation reste bloquée à l’intérieur de l’enceinte, elle est institutionnalisée et relativement désamorcée. Mais précisément l’art contestataire des années 60 puis l’art conceptuel et le land art n’existent-ils pas uniquement par rapport au musée ? Autrement dit, il est impossible de parler d’art contemporain sans parler d’espaces muséaux qu’il se définisse pour ou contre le musée. Alors qu’il étai possible de craindre que l’institution muséale momifie l’art vivant, c’est l’art contemporain qui a mis le musée sans dessus dessous. Il faut dès lors considérer la manière dont les artistes ont questionné la notion de musée au travers de leurs œuvres. Il faut bien constater l’attention constante portée par les artistes à la manière dont l’œuvre artistique s’inscrit dans l’espace. Ces deux observations témoignent de la préoccupation centrale, et nullement anecdotique ou mercantile, de tous les artistes pour la forme muséale dont l’enjeu demeure la question de l’espace destinal de l’art.

1.4.2 La neutralité des espaces muséaux
A l’opposé des « musées exhibitionnistes » analysés dans le 1.2.3, certains lieux d’exposition ont essayé de se remettre en question : c’est la tendance vers une plus grande sobriété visant à mettre en valeur les oeuvres plutôt que le bâtiment. Prédomine alors la conception de musées de dimensions moyennes, privilégiant des articulations de salles aux volumes simples éclairées par un éclairage zénithal, recherchant pour l’intérieur du musée la plus grande neutralité afin de ne pas interférer sur la perception des œuvres exposées. La façade identifie le musée, alors qu’à l’intérieur, rien ne doit altérer la contemplation. C’est le musée "cube blanc". Les œuvres sont "coupées" de la réalité extérieure, elles sont protégées dans le lieu, lui-même insignifiant.

Cette tendance ne répond pas à cette notion de partenariat entre les espaces d’expositions et les oeuvres d’art puisqu’elle ne requiert aucune implication de la part des espaces d’exposition. En effet, comme je l’ai souligné dans le 1.2.2, un des principaux desseins de l’art contemporain est de transmettre les interrogations de l’artiste par le biais de sensations. L’espace d’exposition doit dès lors « activer » l’œuvre d’art, participer à cette transmission. Or il me paraît illusoire de croire que cette activation puisse être neutre. Le penser c’est croire que l’œuvre pourrait se donner d’elle-même indifféremment de l’endroit où elle se trouve, et que le lieu où elle se poserait n’était pas quelque part. L’intention selon laquelle on veut présenter l’œuvre sans reste, dans une clarté sans ombres, conduit à un paradoxe : croire pouvoir montrer l’œuvre à 360° équivaut alors au refus de l’activer. Réfléchir à l’agencement des œuvres, à leur ordre d’apparition selon un parcours, l’importance des intervalles entre les œuvres… instaurent sinon un sens prédéterminé, au moins du sens, une ouverture orientée vers les œuvres. Cette ouverture œuvre avec les œuvres. Impossible dans ces conditions d’être neutre. Chaque mise en place des œuvres, chaque décision de confrontation entre telle ou telle œuvre, implique la responsabilité d’un sens.

1.4.3 L’exposition comme œuvre
Quelles sont les relations entre l’œuvre et l’espace d’exposition ? L’artiste américain Michael Heizer a déclara : « On ne place pas une œuvre dans un lieu, elle est ce lieu ». Pour expliciter mon propos je m’appuierai sur des exemples d’installations in situ d’artiste ayant tellement lié leurs oeuvres à leur expositions qu’ils ont crée essentiellement des expositions en tant qu’œuvres. Pour ces artistes, l’exposition est devenu un champ critique d’exploration. Quelques exemples :

- Daniel Buren,1975, Musée de Monchengladbach, A partir de là : il pose un papier peint rayé blanc/bleu au rez-de-chaussée, blanc/marron dans l’escalier, blanc/rouge au premier étage, à l’exception des emplacements où ont été ordinairement accrochés les tableaux depuis quelques années. « L’exposition, dit Buren, traite de la rétrospective. Elle marque, en relevant le blanc des murs du musée, une rétrospective possible de l’activité passée du musée sous les directives d’un même responsable ». Les tableaux de la collection sont invisibles et ce qui constitue l’exposition, ce sont les murs, les éléments d’architecture. Ce dispositif, imaginé par Buren, réactive la mémoire selon des moyens mnémotechniques abstraits.

-Bruce Nauman, 1970, Centre George Pompidou, Going around the corner: On tourne aux quatre coins d’un cube fermé de 2m84 de haut. Quatre caméras et quatre moniteurs sont placés aux quatre coins. Chaque caméra qui capture l’image du passant est connectée en réalité au moniteur qui lui est opposé. Marchant autour du cube, le passant aperçoit l’image fugace d’une personne qui est en fait elle-même filmée de dos, au moment où quelques secondes plus tôt, il tournait l’angle précédent. Il ne peut avoir conscience qu’il s’agit de lui-même et il croit qu’un autre le suit. L’expérience à laquelle l’artiste nous convie est celle d’une désorganisation de la perception et d’une perte de repère. Il apporte une vision de soi inhabituelle, de dos. Il expose un dispositif qui n’est pas une fin en soi, mais qui est un moyen complexe et efficace de poser au sujet regardant et acteur, la nature de ses visions et de ses perceptions. Il n’y a pas d’objet exposé à proprement parler, mais des sensations, des affects à ressentir.


Il ne s’agit donc plus, à l’instar du musée dont le modèle s’est affirmé au 19ème siècle, d’exposer l’objet, tel une rareté, comme un héritage des fameux cabinets de curiosités des humanistes de la Renaissance. Le lieu comme le sujet sont devenus objets de représentation. L’exposition est le lieu, le possible d’un chantier, où l’œuvre se fabrique et se construit en partenariat avec elle. L’exposition devient œuvre d’art lorsqu ‘elle est prise à partie par des artistes. Il convient alors lors de la création d’espaces d’exposition de l’art contemporain d’inventer de nouvelles règles du jeu de l’exposition


CONCLUSIONS
De cette analyse, plusieurs idées fortes se dégagent :
// L’art contemporain est art qui rompt avec le passé. Cette rupture s’exprime en premier lieu avec l’apparition de combinaisons de formes nouvelles au début des années 70. C’est cette pluridisciplinarité qui caractérise la véritable rupture avec l’art du siècle dernier.
// L’art contemporain est un art qui abandonne l’idée de contemplation du « Beau ». Cette rupture s’opère au profit du sens et des sensations véhiculés par l’œuvre d’art. Dès lors, l’œuvre n’est plus un objet à regarder mais une expérience à vivre par le public.
// L’œuvre d’art contemporain n’est donc plus un objet mais l’illustration d’une idée. Dès lors elle devient transformable, fugace, malléable, éphémère. L’art contemporain est donc conçu pour une durée spécifique : le temps de l’expérience.
// L’art contemporain est un art qui rompt avec le don d’ubiquité des œuvres. Il est conçu pour un temps donné mais également pour un espace donné. Le lieu d’accueil devient un matériau participant à l’expérience.
J’ai choisi, pour ce projet, d’exposer majoritairement l’art d’installation privilégiant les ouevres à fort caractère conceptuelles, qui me semble illustrer au mieux ces conclusions.
//En effet, l’installation est une forme novatrice de l’art apparu dans les années 60 combinant différents médias en vue de modifier l’expérience que peut faire le spectateur d’un espace singulier ou de circonstances déterminées.
//Ce type d’œuvre n’a donc pas d’existence ou de fonction en dehors de ses effets sur les hommes qui les observent.
//L’installation implique une forme de nomadisme artistique et philosophique. Elle apparaît comme un campement que l’on monte et démonte à sa guise puisque dans ces installations circulent des individus mais aussi des pensées.
//Enfin, les installations sont directement liées au lieu d’exposition. Elles peuvent seulement exister dans l’espace pour lequel elles ont été créées et pour lequel l’artiste a conçu un arrangement particulier.

2.ANALYSE DU CONTEXTE PHYSIQUE, SOCIAL DU PROJET

2.1 Situation géographique des lieux d’exposition d’art contemporain

2.1.1 Les grandes institutions muséales
Depuis les années 80, les grandes expositions de prestiges prises d’assaut par les foules de visiteurs dans l’ensemble du monde occidental se multiplient et les musées d’art moderne et contemporain prolifèrent. On ne compte pas moins de six cents nouveaux musées crées au Etats-Unis au cours de ces trente dernières années, plus de quatre cents ont été crées ou rénovés depuis une quinzaine d’années en France, et l’on dénombre pas moins de cinq mille sites de musées sur le web. En somme, le monde se muséalise à mesure que le musée se fait monde.

- Primauté donnée aux grandes agglomérations


Le Palais de Tokyo : site de création contemporaine à Paris
Le MAC : musée d’art contemporain de Marseille
Le MOCA : musée d’art contemporain de Lyon
Les abattoirs : musée d’art contemporain de Toulouse
Le musée d’art moderne et contemporain de Nice
Le musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg
Le CAPC : musée d’art contemporain de Bordeaux
Le musée d’art moderne et contemporain de Lille
Le carré d’art : musée d’art contemporain de Nîmes
L’institut d’art contemporain de Villeurbanne : le FRAC Rhône-ALpes
Musée d’art contemporain d’Avignon
Le MAC/VAL : musée d’art contemporain de Vitry Paris 2 147 857 habitants

Marseille 807 071 habitants

Lyon 453 187 habitants

Toulouse 398 423 habitants

Nice 345 892 habitants
Strasbourg 267 051 habitants
Bordeaux 218 948 habitants
Lille 191 164 habitants
Nîmes 137 740 habitants
Villeurbanne 127 299 habitants
Avignon 88 312 habitants
Vitry sur Seine 79 322 habitants*
*Chiffres tirés du site Internet : http://www.lexilogos.com/population_communes.htm

Après analyse des Musées d’art contemporain en France, il ressort qu’il en existe 13, dont 12 situés dans les 50 villes les plus peuplées de France (Lyon, Toulouse, Strasbourg…). A l’exception du musée d’art contemporain de Rochechouart (qui est une réhabilitation de château), aucune ville de moins de
80 000 habitants ne possède son propre musée d’art contemporain, ce qui explique en partie le peu d’intérêt que porte le public à ce type d’art.

Il est donc nécessaire de créer des lieux d’exposition au cœur des régions afin de sensibiliser la population à l’art contemporain mais aussi de soutenir la création actuelle locale.

*Explication de la centralisation des musées d’art contemporain
Le nouveau paysage muséal qui aura caractérisé les années 80 est également dû à cet intérêt manifesté par les villes et les régions pour ces musées qui mobilisent les foules. Car le musée est aussi une vitrine pour la ville, un argument pour attirer les investisseurs, ou encore une manière de faire fructifier le patrimoine. Il est donc aussi un objet de rivalité entre villes et régions. A cet égard, "l'ouverture des grands chantiers mitterrandiens procède de cette politique de prestige, bien éloignée des préoccupations muséologiques ou de l'amour de l'art."

Il est évident que toutes les villes ne peuvent se financer un musée d’art contemporain de plusieurs milliers de m². De plus, le public d’agglomération moyenne,peu habitué à aller voir des expositions d’art contemporain, ne serait pas au rendez-vous : soit par manque d’intérêt ou soit par méfiance envers un bâtiment d’une grande envergure implanté dans leur ville sans qu’il l’ai même désiré. Il est donc nécessaire d’attirer le public en créant des événements d’art actuel de manière ponctuelle dans leur ville ou une ville proche de chez eux afin de susciter une curiosité pour l’art contemporain.

*Conséquence de la centralisation des musées d’art contemporain : le musée comme mass média
Le musée est redéfini comme un complexe culturel, où les espaces d’exposition ne sont plus qu’une dimension de cet équipement qui comprend des espaces plus « accueillant » et indéniablement lucratif comme la librairie, la boutique, le restaurant, la cafétéria, les vestiaires, les toilettes spacieuses, les ateliers pédagogiques…  Toutes ces fonctions, culturelles et mercantiles mêlées, sont intégrées dans un espace muséal qui est fait pour enfourner des lots de visiteurs et opérer comme signe monumental.
Les espaces d'exposition de ces grands ensembles ne sont-ils plus qu'une dimension de cet équipement qui comprend des espaces plus accueillants et indéniablement plus lucratifs comme la librairie, la boutique, le restaurant? Toutes ces fonctions, culturelles et mercantiles mêlées, sont intégrées dans un espace muséal qui « ballade le visiteur dans une grande surface commerciale entre ses allées de produits-souvenirs à emporter, où la collection ne fait plus figure que d'attrait sentant encore un peu le devoir de culture que l'on accomplit pour la forme, assez vite pour se réserver le temps de profiter des autres attractions du musée. »
Ces équipements de tourisme et de loisirs culturels ne favorisent pas l'accès aux valeurs émotionnelles et intellectuelles de l’art.

Les centres commerciaux de l’art sont bannis dans mon projet. En effet, l’art contemporain ne se consomme pas comme tous les autres produits de consommation. Ce n’est pas en concevant des boutiques attractives ou des magasins de design que le public s’impliquera davantage dans les réflexions engendrées par les œuvres d’art contemporaines.

2.1.2 Les centres d’art contemporain
Nés d'expériences associatives dans les années 70 sur le modèle des Kunsthallen, les centres d'art développent des activités de recherche et d'expérimentation à travers une politique d'exposition, d'édition, de commande, de production d'oeuvres, d'accueil d'artistes ainsi que des missions de formation et de pédagogie. Depuis 1983, l'Etat a consolidé ces expériences d'initiatives privées en leur apportant un soutien régulier ou en favorisant en collaboration avec certaines collectivités locales, la création de nouveaux centres d'art.
Ceux-ci jouent un rôle essentiel dans le domaine des arts plastiques à travers leurs missions originales. Ils sont complémentaires des actions des musées qui se sont ouverts à l'art contemporain. Ils représentent un véritable outil pour l'artiste et développent leurs actions de pédagogie, de formation et de sensibilisation pour une ouverture à un public plus nombreux.
Les centres d’art placent l’art et les artistes au cœur de leur activité, en  privilégiant la production d’œuvres : les artistes sont invités à développer des projets spécifiques. Au-delà de la simple invitation à exposer, il s’agit de développer une activité de recherche artistique.
Les centres d’art se positionnent comme des laboratoires, à la fois réactif, pleinement engagé auprès des artistes, et soucieux d’établir, dans une logique de proximité, un réel dialogue avec tous les publics qu’il accueille.
Les centres d’art contemporain constitueront un outil A REVOIR


2.1.3 Les galeries d’art contemporain
- Les galeries des petites agglomérations : folklore

- Les galeries des grandes agglomérations : cercle intime d’initiés

Ccl : pour les 2 cas magasins d’art dans réhabilitation


2.1.4 Les FRAC
-Qu’est ce qu’un FRAC ?
En 1982, une convention culturelle entre le ministère de la Culture et les régions met en place dans chaque région de France, un Fonds Régional d'Art Contemporain, régi par la loi sur les associations dans la double perspective de promotion des arts plastiques et de décentralisation artistique. En 2006, il en existe un par région, implanté le plus souvent dans la préfecture de la région concernée.

-A quoi sert un FRAC ?
* Sa vocation première est la constitution d'une collection d'art contemporain, représentative de la création actuelle. L’acquisition régulière d’œuvres d’art leur permet de constituer une collection patrimoniale de référence qui reflète la diversité et les enjeux de l’art actuel international. Ces achats, leur inscription dans la collection régionale, constituent un soutien à la création contemporaine.
* Le soutien à la création contemporaine
Elaborant un projet artistique et culturel propre, le FRAC définit un ensemble d'objectifs en matière d'acquisition et de commande, d'édition, de programmation d'expositions et d'organisation de conférences ou de séminaires, de développement des relations avec les artistes français et étrangers (résidences en ateliers-logements) et de mise en place d'une politique de médiation avec le public.
* A travers la diffusion de leurs collections dans les régions, en France et à l'étranger, les FRAC(s) contribuent à la sensibilisation du public à l'art contemporain. Certains FRAC ne possède pas de lieux d’exposition. La diffusion de cette collection se fait par l’animation d’un réseau d’art contemporain dans la région, par l’organisation de manifestations et d’expositions réalisées à partir de la collection dans des centres culturels, des musées, etc.
* La sensibilisation d’un large public par un accompagnement systématique des visiteurs dans chaque exposition organisée par le Frac. L’intervention en milieu scolaire ("Des élèves à l’œuvre"), l’important dispositif de sensibilisation des publics éloignés de l’offre culturelle ("Culture à l’hôpital"), les partenariats avec diverses instances (centres culturels, associations, collectivités locales) ainsi que le programme de formation des partenaires participent de ce projet de sensibilisation et d’incitation à la pratique culturelle.

En vingt ans, les Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) ont contribué à sortir l'art contemporain des cercles parisiens pour diffuser dans les régions et les départements les propositions esthétiques les plus novatrices des créateurs d’aujourd’hui.
Pour mon projet, je m’appuierai donc sur ces structures avec qui j’entretiens des objectifs communs à savoir : la mobilité des collections et la prépondérance des actions hors les murs.


CONCLUSIONS
Il est donc indispensable de créer un lieu d’exposition de l’art contemporain de proximité. Actuellement l’art contemporain se diffuse au travers de structures implantées dans les grandes agglomérations françaises. La rencontre « spirituelle » entre le public et l’art contemporain ne peut se faire que si les oeuvres se situent proche du public, de tous les publics. De plus, l’individu entretenant une relation affective avec le territoire qu’il habite, lui proposer un lieu dans sa ville devrait créer chez lui un sentiment de curiosité et d’intérêt nécessaire à la découverte d’un art nouveau.


2.2 ASPECTS SOCIOLOGIQUES DES LIEUX D’EXPOSITION D’ART CONTEMPORAIN

Il est essentiel de connaître le public qui fréquente les lieux d’exposition en général et ceux consacrés à l’art contemporain en particulier pour ne pas manquer la médiation que le musée doit assurer entre lui et les œuvres. Je m’interrogerai en premier lieu sur les différentes catégories de public qui fréquentent les lieux d’exposition en général afin de comprendre pourquoi l’art contemporain n’attire pas beaucoup de visiteurs. Je chercherai donc à savoir quels sont les facteurs qui empêchent et qui facilitent la rencontre entre le public et l’art contemporain dans le but de prendre ces éléments en compte pour mon projet.

2.2.1 Qui fréquentent ces lieux d’exposition ?
- Hausse de la fréquentation des musées depuis 50 ans
C’est à partir des années 80 que se sont multiplier les grandes expositions de prestige prises d’assaut par des foules de visiteurs dans l’ensemble du monde occidental, et que s’est vu proliférer les musées, particulièrement les musées d’art moderne et contemporain.
L’analyse sociologique du public des musées révèle une disparité importante entre les catégories sociales qui les fréquentent. Compte tenu de l’élévation générale du niveau d’études depuis l’après guerre, d’une part, et la multiplication des expositions proposées, d’autre part, il était prévisible qu’en valeur absolue les entrées annuelles dans les musées se soient accrues.
Mais il ne suffit pas de savoir que la fréquentation des musées a doublé de 1960 à 1980, les questions qui se posent sont de savoir qui, pourquoi et comment le public va au musée.

- Analyse sociologique
On constate, après une enquête faite en 1981, que 17,3 % des agriculteurs et 19,5 % des manoeuvres se sont rendus au moins une fois dans un musée durant l’année précédant l’enquête, contre 61 % des cadres supérieurs et professions libérales. On observe aussi l’importance du niveau d’études: 14 % des non diplômés se sont rendus dans un musée, contre 55,6 % des bacheliers et titulaires de diplômes supérieurs. Enfin, on remarque que la fréquentation des musées et des expositions est une des seules pratiques de loisir où femmes et hommes y figurent à peu près à égalité.
Donc il n’existe pas un public de l’art, mais des publics socialement différenciés, stratifiés par milieux sociaux. Ceci s’observe notamment dans les nombreuses enquêtes faites sur la fréquentation des musées. Celle de Bourdieu, qui était le premier à l’étudier à grande échelle (1964-1965), révèle une extrême inégalité sociale d’accès aux oeuvres d’art par les musées et les expositions: le taux de fréquentation annuelle présentait un écart allant de 0,5 % pour les agriculteurs à 43,3 % pour les cadres supérieurs et 151,1 % pour les professeurs et spécialistes d’art. Bourdieu tente d’expliquer ce phénomène en mettant en évidence le rôle primordial de l’inculcation familiale – l’influence de l’origine sociale ne se limite pas à l’inégalité des revenus et des niveaux de vie, mais aussi à la transmission du capital culturel, mesurée par les diplômes.

- La coupure entre initiés et profanes pour les expositions d’art contemporain
Par ailleurs, à chaque strate de publics correspond un type de production artistique. D’après l’enquête de Bourdieu, on remarque que globalement les classes populaires et les classes moyennes ont le même jugement sur la peinture: bien mais difficile. Puis si on regarde de plus près, on voit que plus on monte dans les classes, moins il y a de gens qui ne sont pas intéressés par la peinture et moins ils la trouvent difficile, ceci grâce à l’éducation et la transmission des valeurs artistiques par la famille. Si on observe après cela les jugements sur les différentes formes d’art, l’impressionnisme, l’art abstrait, moderne et contemporain, on remarque qu’elles sont d’autant plus appréciées qu’on monte dans les classes.
D’après la même enquête, en s’intéressant aux choix des peintres préférés de chaque classe sociale, on peut constater que Renoir et Van Gogh sont les plus appréciés dans les trois classes. Mais on remarque aussi que Raphaël correspond surtout aux goûts populaires et moyens, que Buffet est surtout aimé par les classes moyennes et que Kandinsky et Bruegel font surtout parti des goûts des classes moyennes et supérieures. Encore une fois, on remarque que la petite bourgeoisie nouvelle a une plus grande préférence pour des artistes correspondant à un goût plus distingué, tels que Bruegel et Kandinsky, que les autres composantes des classes populaires.

2.2.2 Pourquoi le public visite-t-il ces lieux d’exposition ?
D’après les études sociologiques vues précédemment, il apparaît que plus l’art est contemporain moins il intéresse le public. Je m’attellerai donc à rechercher les motivations du public qui se rend au musée d’art contemporain afin de comprendre pourquoi cet art suscite moins l’intérêt chez le public.
Pour cela, je m’appuierai sur un exemple d’exposition temporaire au Centre George Pompidou. Cette exposition, située à l’entré de la BPI, pouvait être visitée tout à fait indépendamment d’un quelconque usage de la bibliothèque. Et inversement. Trois types de visites se dégagent de cet exemple :

- La première est basée sur l’intention : venus à la bibliothèque, spécialement pour cette exposition, sachant à l’avance qu’il la trouverait là. Ils ont été averti de son existence par la critique, les affiches. Ces visiteurs ont la démarche classique des visiteurs de musées : intéressés par le thème, ils anticipent sur ce qu’ils vont trouver. Mais à la différence des musées, ils sont très minoritaires : 7% du public.

-La seconde est fondée sur l’occasion : Non qu’ils n’aient pas d’intention précise au départ, ils en ont une autre qui est celle d’utiliser les services et les documents de la bibliothèque. Confrontés à quelque chose qu’ils ne cherchaient pas, ils profitent de leur présence sur place pour y consacrer un peu de temps : 50% du public.

-La dernière est fondée sur la disponibilité : nombre de gens et précisément à Beaubourg, en ne sachant pas à l’avance ce qu’ils y trouveront, tout en étant assurés d’y rencontrer des sollicitations. Plus que sur une activité ou un support particulier, ils investissent un lieu, globalement perçu (on va à « Beaubourg »), ou sur un temps, défini dans sa durée et non dans son point d’application (on n’y va « 2 heures ») : 43% du public.

De cette étude se dégage un point essentiel :
- Le public se rend essentiellement dans un centre d’art sans projet particulier mais dans le but d’être sollicité par une exposition sans connaître forcément les artistes qui la constituent.

2.2.3 Comment le public visite-t-il ces lieux d’exposition ?
- La notion de parcours
Qu’elles soient artistiques ou didactiques et quelle que soit la diversité de leurs dispositif, toutes les expositions se rejoignent sur au moins un point : l’exigence d’une déambulation. Le parcours d’un musée qui module l’espace et suscite une intimité entre les œuvres et ceux qui les contemplent est une notion essentielle à approfondir avant l’élaboration de mon projet. Deux typologies de parcours se distinguent dans la plupart des expositions :
//En boucle : ce parcours répond généralement aux présentations chronologiques.
//Labyrinthique : ce parcours répond généralement à un discours plus éclaté.
A ces deux typologie s’ajoute une typologie « libre » où l’espace d’exposition assimilé à une place publique laisse le choix de son appropriation au visiteur.
Ce type de parcours, à quelques exceptions près, se repose uniquement sur l’autosuffisance des œuvres d’art, la force supposée de leur impacts, en prenant peu en compte le travail opéré par la mise en espace elle-même et le mouvement du visiteur à travers elle. Dans ce mode de fonctionnement, les expositions de ce type restent au fond proches du principe des magasins constitués d’étalages aguicheurs ou d’accrochages élégant. Or la responsabilité du sens, engagé lors de la conception d’une exposition, doit engendrer chez le visiteur un itinéraire de pensée. Et cet itinéraire de pensée est solidaire d’un déplacement physique bien réel. En somme, proposer un parcours arbitraire aux visiteurs en ne leur imposant aucunes contraintes revient à ne pas s’engager dans la recherche d’un sens, recherche primordiale de l’artiste.
A contrario, proposer un parcours rigide, à savoir un trajet « forcé », revient à imposer ses déplacements. Sans engagement physique, aucune génération de pensée n’est possible.

- Les usages : analyse du comportement des visiteurs au sein d’une exposition
Entre les deux typologies extrêmes citées ci-dessus, s’inscrit donc le parti pris de laisser une certaine part d’indétermination dans le parcours d’une exposition. Comment un visiteur s’approprie-t-il ces espaces d’exposition ? D’après une étude réalisée par ?????, il existe trois comportements type :
//L’attitude du papillon : sa stratégie est la plus spécifique à l’égard du thème de l’exposition car sa visite est motivée. Dans le cadre de cette motivation, il sait ce qu’il est venu chercher. Le papillon est le sujet qui maîtrise le mieux son rapport à la culture. Son corps signifiant semble modelé par la figure
de la lecture proprement dite, c’est à dire le livre.
//L’attitude de la fourmi : sa stratégie est aussi culturelle dans le sens qu’elle est déterminée par un lien particulier, sinon au thème de l’exposition, tout au moins à Beaubourg comme institution de culture. Mais sa stratégie est plutôt passive et scolaire. La fourmi exprime un certain souci d’apprendre et donc, en quelque sorte, une certaine docilité.
//L’attitude du poisson : il déploie une stratégie que l’on pourrait dire « en retrait ». Il semble vouloir réduire au minimum sa visite. Son déplacement pourrait s’assimiler à celle du passant qui, l’air pressé, jette quand même un œil à la vitrine ou à celle d’un touriste qui n’aurait qu’une journée pour visiter et veut quand même faire le tour de la ville qu’il visite.
//L’attitude de la sauterelle : son parcours est un voyage subjectif. La sauterelle désarticule la surface structurée de l’exposition pour ne retenir les quelques points avec lesquels il est en résonance.

CONCLUSIONS
Cette analyse de typologies des comportements des visiteurs s’applique à la plupart des expositions d’art contemporain (dans les galeries en particulier). Ces attitudes sont engendrées par l’agencement d’œuvres dans des espaces avec l’unique souci de présentation. Mais, l’alignement des œuvres sur des cimaises crée le plus souvent une uniformité ennuyeuse. La disparité des œuvres s’accorde mal avec la variation régulière de la présentation sérielle. Je comprends mal l’incohérence formelle d’une disparité d’œuvre et d’une uniformité de présentation (le marché aux puces n’est pas loin, mais a son charme). De plus cette successivité est perçue simultanément : le public voit d’abord plusieurs œuvres en même temps qui interagissent de manière complexe, ensuite il focalise, il isole momentanément par le regard, compare puis choisit (la plupart du temps selon des critères esthétiques, ce qui ne correspond pas aux desseins de l’art contemporain) l’œuvre vers laquelle il va s’approchait. L’actuelle surabondance mime celle des supermarchés transformant le spectateur en consommateur pressé. C’est l’époque de l’exposition spectacle dont le contenu à proprement dit importe de moins en moins.

2.2.4 Quels sont les facteurs qui empêchent la rencontre entre le public et l’art contemporain ?
- Le rejet du public
Si le public rejettent l’art contemporain c’est parce qu’il perçoit les oeuvres avec incompréhension et scepticisme. En effet ces oeuvres apportent assez peu de réponses à une attente d'harmonie visuelle, de symétrie, ou de divertissement et quelquefois fuient volontairement même l'émotion pour mieux agir. Pourtant, jamais ce dont parlent les artistes d’aujourd’hui n’a été aussi proche de nous. Jamais leur préoccupations n’ont étés aussi en phase avec notre monde contemporain : Ils nous parlent en effet  de notre relation à l’image, aux médias, ils nous parlent de notre relation au couple, de la sexualité, ils nous parlent de notre relation à l’environnement, à l’économie, ils nous parlent de nos désirs, de nos angoisses, de nos aspirations… Face à cet enjeu, l'engagement d'actions de médiation et d'éducation artistique, notamment en direction des jeunes publics, est fondamental.  Pour ce faire il convient d'engager un travail de sensibilisation et de prendre en considération les difficultés (légitimes) rencontrées fréquemment par le spectateur non spécialiste face aux oeuvres actuelles, et à lui faciliter l'appropriation des pistes d'accès nécessaires pour se rendre dans la périphérie directe de l'œuvre.
Car ce n'est bien souvent pas l'oeuvre elle même qui déconcerte ou qui crée ce malaise dubitatif régulièrement ressenti par beaucoup :
· C'est souvent la façon dont on aborde l'oeuvre qui fait écran à sa perception. 
· C'est souvent l'idée que l'on se fait, à priori, du rôle et de la fonction de l'art qui obstrue le message de l’oeuvre. 
· C'est souvent les attentes que l'on met en jeu face aux oeuvres qui ne correspondent pas avec celle(s) que l'oeuvre entend servir . 

- Mauvaise approche muséographique
Un des facteurs essentiel qui empêche la rencontre entre l’art contemporain et le public réside sur les formes des expositions proposées. L’art contemporain est un art en train de se faire, un art d’expérimentation, une œuvre exposée ne restera peut-être pas dans la postérité. Les espaces d’exposition de l’art contemporain ne peuvent en aucun cas être similaires aux espaces d’exposition de l’art « ancien ». Il ne suffit pas d’accumuler des œuvres d’art contemporain dans un vaste espace pour que le public s’essai à l’expérience de cet art si particulier. D’après une étude récente menée par le Centre Pompidou parallèlement à l’exposition « Le Mouvement des Images », 75% du public n’est pas satisfait par le parcours de la visite et 78% n’est pas satisfait des supports d’aide à la visite. Il est donc indispensable de proposer une nouvelle typologie de parcours.

- Situation géographique
Comme analysé dans le 2.1, la présence d’expositions majeures dans les grandes agglomérations ne permet pas de faciliter la rencontre entre l’art contemporain et le large public.

CONCLUSIONS
INSTABILITE DU MUSEE

3. PROGRAMME – JUSTIFICATION – ASPECTS HISTORIQUES, ECONOMIQUES ET REGLEMENTAIRES

3.1 PROGRAMME/ JUSTIFICATIONS
Pour exposer l’art contemporain, j’ai décidé de concevoir une installation éphémère de superficie d’environ 1000m² dans des villes de moins de 50 000 habitants. L’objectif de ce projet est de proposer des espaces permettant la rencontre entre l’art contemporain et le public.

3.1.1 Pourquoi une installation mobile ?
- Instabilité du musée.
Suite aux analyses de la première partie, il est évident que si le musée est d’un côté un lieu de conservation matérielle des œuvres, d’un autre il n’est pas l’espace éternitaire de la fixation de l’œuvre selon un mode définitif de présentation. Ce n’est pas l’œuvre qui est subordonné au musée, c’est le musée qui est subordonné aux œuvres, et donc à la mutabilité des présentations en fonctions des artistes et des thèmes abordés. L’espace du musée est le plus instable qui soit. Exposer l’art contemporain est un acte fragile.
Il me paraît donc judicieux de proposer un lieu évolutif, transformable et transportable afin de présenter au mieux l’art contemporain.

-L’art contemporain : un art en mouvement
Comme je l’ai précisé dans les analyses de la première partie, l’art contemporain créera potentiellement l’histoire de l’art. Il est fugace, en perpétuelle transformation puisque expérimental. De plus, certains artistes nous questionnent sur la notion du temps en proposant des œuvres éphémères, périssables. Or les lieux qui exposent cet art se définissent comme partenaire des œuvres. L’exposition active les œuvres ou inversement. Il n’est donc pas concevable pour ce projet de proposer les mêmes typologies qu’un musée d’art traditionnel. Il est donc nécessaire de concevoir ce projet avec les mêmes concepts que ceux de l’art contemporain, à savoir proposer une architecture fragile qui peut se transformer.
Dans ce projet je proposerai une structure ayant la possibilité de se métamorphoser en fonction des œuvres qu’elle accueillera et en fonction des villes où elle s’implantera.

-Faciliter la rencontre entre le public et l’art contemporain
Pour faciliter cette rencontre, il est indispensable (évidemment) de trouver un lieu où la rencontre s’effectuera. Et pour qu’il y ait rencontre, il faut qu’il y ait l’envie. Comme souligné précédemment, il serait impossible de créer un musée d’art contemporain dans un grand nombre de villes moyennes du point de vue financier. Du point de vue humain non plus, un imposant bâtiment pérenne se proclamant musée d’art contemporain ferait sans doute fuir les populations des moyennes agglomérations. En effet, la population exprime un certain rejet face à l’art contemporain et construire un bâtiment dans leur ville ne ferait qu’attiser leur méfiance et qu’alimenter les discussions de comptoirs à savoir « Ah, t’as vu ce qu’ils font de notre argent ! Le musée des horreurs ! ». Néanmoins, afin d’attiser la curiosité du public réfractaire, j’installerai le lieu d’exposition sur leur territoire afin de créer un sentiment d’appartenance et affectif, mais de manière temporaire.
Je m’attellerai à créer un événement pour un temps déterminé, une attraction qui sera susceptible d’intéresser le public qui visite des expositions le plus souvent lorsque l’occasion se présente et lorsqu’il en a la disponibilité (Cf. 2.22).

3.1.2 Pourquoi l’installation sera de taille moyenne ?
-La superficie de ce lieu d’exposition sera comprise entre celle des grandes institutions muséales (5000 m² d’espaces d’exposition en moyenne) et celle des FRAC régionaux (300m² d’espaces d’exposition en moyenne). Comme explicité dans le 3.1.1, imposer un bâtiment massif aux surfaces importantes ne convient pas pour ce projet. De même, proposer un bâtiment aux dimensions trop réduites (inf. à 500m²) ne semble pas adéquat car ces proportions créent chez le public néophyte un sentiment de ne pas appartenir au milieu de l’art et donc de ne pas « oser » visiter l’exposition. Parallèlement, cela crée chez le public averti un sentiment de frustration de ne pas en voir plus. Enfin, pour favoriser la rencontre entre le public et l’art contemporain, le lieu d’exposition doit avoir un impact sur la population et pour cela être de dimensions conséquentes.

-Comme précisé dans la première partie, les œuvres d’art contemporain explorent de nouvelles formes de représentation. Cette pluridisciplinarité (vidéo, installation, performances..) nécessite des espaces suffisamment vastes. De plus, visiter une exposition d’art contemporain, c’est vivre une expérience particulière, il ne s’agit plus de regarder passivement des œuvres accrochées aux quatre pans de mur d’une salle de musée. Il me semble que le public ne peut « vivre » cette expérience dans un espace trop étriqué.

3.1.3 Pourquoi s’installer dans des villes aux populations inférieures à 50 000 habitants ?
-Comme analysé dans la deuxième partie, les principales institutions muséales se situent dans les plus grandes villes de France. Les FRAC, outil de promotion de l’art contemporain sont implantées dans chaque préfecture de région mais ne possèdent pas suffisamment d’espaces d’exposition pour remplir mes objectifs. Certains centres d’art contemporain sont localisés dans des villes moyennes mais ceux-ci axent principalement leurs actions en faveur des artistes. Enfin, il existe de nombreuses galeries mais celles-ci ont comme priorité la valeur marchande des œuvres. En somme, je souhaite implanter mon projet dans des agglomérations moyennes pour toucher un public qui n’est pas confronté avec l’art d’aujourd’hui.

-Comme précisé dans la deuxième partie, les public le moins intéressé par l’art contemporain comprend en grande majorité les classes moyennes et populaires. Or par la formulation « faciliter la rencontre entre l’art contemporain et le public », j’entend TOUS les publics.

3.1.4 Quels seront les espaces proposés par la structure ?
-Rupture esthétique du lieu d’exposition
Comme explicité dans la première partie de cette étude, aujourd’hui les concepteurs de musées accordent une importance grandissante à l’aspects extérieur de leurs bâtiment. Cette surenchère des formes les plus spectaculaires et des matériaux les nobles ne sert en rien le contenant de ce contenu éclatant. Je m’attellerai donc à proposer un bâtiment aux formes induites par le contenant à savoir l’art actuel. Mon objectifs est de créer des espaces intérieurs partenaires des œuvres et non une enveloppe scintillante. De plus l’implantation de mon projet dans des villes moyennes nécessite une forme globale sobre afin de s’inscrire dans un paysage urbain sans le déstabiliser.
Je m’éloignerai du principe du White Cube qui ne peut fonctionner. Exposer implique une participation et cette participation implique un parti pris donc il est impossible de proposer des espaces sans engagements dans ce projet.
En somme, je pense que ces deux tendances actuelles devrait s’inverser : à savoir une enveloppe neutre et des espaces intérieurs riche de sens.

-L’exposition comme œuvre
Comme décrit dans la première partie, les œuvres d’art contemporain interroge notre rapport à l’espace et sont créer le plus souvent pour un espace muséal précis. C’est pourquoi je proposerai pour ce projet des espaces internes à « mettre en art ». Ces espaces seront transformables, variés, en somme ils seront à la disposition des artistes afin qu’ils se l’ai approprient. Je m’attellerai à concevoir des espace aux dimensions diverses, aux angles différents afin de créer des atmosphères particulières.

-Primauté donné au parcours
Comme analysé dans la deuxième partie, je porterai une attention approfondie à l’élaboration du parcours muséographique. Je rejette l’idée du mode d’exposition des œuvres contemporaines qui serait identique à celui des œuvres anciennes. En effet, il peut être intéressant d’accrocher quinze tableaux de maître dans une unique salle ne comportant pas de recul et favorisant le zapping du spectateur, mais il est inconcevable de faire de même s’il s’agit d’œuvres d’art contemporain qui s’abordent différemment puisque le spectateur n’est plus dans un état de contemplation de sensations. De plus c’est le déplacement des visiteurs qui créera l’architecture de ce projet.


3.2 ANALYSE DES LIEUX D’EXPOSITION D’ART CONTEMPORAIN MOBILES

3.2.1 Aspects historique de l’architecture mobile
Nous associons à la plupart des bâtiments qui nous environnent des caractéristiques de stabilité et de pérennité. Pourtant, les architectes ont pensé et construit de nombreux projets d’architectures mobiles, temporaires, évolutives. A travers ces projets, c’est la vie des bâtiments mais aussi la manière dont ses usagers les habitent qui importent. Et au delà des bâtiments, on peut aussi penser la ville comme une immense architecture en constante mobilité, par la transformation de son urbanisme, les déambulations de ses habitants, etc. La dimension du temps devient primordiale dans cette gestion de l’espace à vivre.
Mobilité (Robert I)
- « Caractère de ce qui peut se mouvoir ou être mû, changer de place, de position. »
- « Caractère de ce qui change rapidement d’aspect ou d’expression. »

- Un groupe d’architectes de la mobilité
Pour faire face à la forte poussée démographique d'après-guerre, de nombreux immeubles sont construits dans les années 50, rapidement. Répondant de manière uniforme aux besoins d'habitants établis comme des "standards", ils suscitent bientôt des critiques.
En juin 1954, les architectes Claude Parent et Ionel Schein publient un article contre le fonctionnalisme et pour la mobilité. Deux ans plus tard, lors du Xe Congrès du CIAM (Congrès International d’Architecture Moderne), Yona Friedman expose pour la première fois les principes d’une architecture mobile et définie par ses usagers. Dans son manifeste L’Architecte mobile, de 1958, Friedman peut ainsi écrire : « Le bâtiment est mobile au sens où n’importe quel mode d’usage par l’usager ou un groupe doit pouvoir être possible et réalisable. » Il fonde cette même année le GEAM (Groupe d’Etudes d’Architecture Mobile) qui, jusqu’en 1962, réfléchira à l’adaptation de l’architecture aux transformations de la vie moderne. Il est rejoint dans cette recherche par de nombreux architectes. Au même moment, Constant développe "New Babylon". La similitude formelle de certains dessins de villes suspendues de Constant et de Friedman masque cependant leurs divergences radicales. En effet, la mobilité est, pour Constant, celle de la migration; c'est le déplacement des individus qui entraîne la transformation de l'architecture.


En prônant la mobilité, les architectes remettent en cause la vision de l'architecture comme élément figé et l'investissent d'une vie propre, qui lui permet de croître, de se transformer et de se mouvoir. C'est le fondement même de l'architecture en occident qui est remis en cause, celui d'une architecture implantée dans un sol, dont elle ne bougerait plus.
Par ailleurs, ils défendent une architecture qui s'adapte aux besoins des individus, et qui est donc fondamentalement évolutive. Mobilité interne à l'habitat (transformer l'habitat existant), mobilité de l'habitat (habitat qui bouge), de la ville et de ses équipements ; autant de pistes exploitées par les architectes pour repenser nos manières de vivre l'architecture.
Enfin, ils redonnent aux individus un rôle actif par rapport à l'architecture, autant dans le choix des éléments de leur habitat que dans leur emplacement et leur transformation.

- L’architecture mobile : les années 50/60

L’architecture évolutive à l’échelle du bâtiment
* Claude Parent & Nicolas Schöeffer, Alpha Habitat, 1954
L'habitant modifie lui-même l’espace intérieur de son logement grâce à des cloisons mobiles, tournantes, pliantes. Dans les projets qu’il conçoit avec Claude Parent, Nicolas Schöffer envisage la ville comme un immense relief "spatiodynamique" composé d’éléments modulés en largeur sur le terrain et ponctué de tours. Chaque ville spatiodynamique possède plusieurs unités de 100 à 250 cellules.


L’architecture mobile: Les cellules
* Arthur QUARMBY, Corn on the Cob, 1962
En 1961, l’architecte anglais Arthur Quarmby crée les premières cellules plastiques monoblocs, caractérisées par leur légèreté, la facilité de leur transport, la rapidité de leur montage, leur bonne isolation, leur surface hygiénique et leur relativement satisfaisante résistance au feu.
Quarmby est aussi le premier architecte à imaginer un agencement des cellules sur un mât. Son Corn on the Cob est un mât de 160 m de haut, incluant aussi une grue pivotante pour assurer le montage et le démontage des cellules.


L’architecture gonflable
* Le groupe Utopie, fondé en France en 1966, rassemble des architectes, des sociologues et des urbanistes. Ses travaux proposent une vision d’un monde construit, flottant, léger, éphémère et mobile, qui s'oppose à l’urbanisme architecturé de l’après-guerre jugé répressif et inerte.

* Peter COOK (Archigram), Instant City, 1968-1970
Il ne s'agit pas d'une ville nomade, mais d'un dirigeable itinérant qui se pose au dessus de villes fixes, et y lâche, temporairement, un certain nombre d'équipements culturels (écran de cinéma de plein air par exemple). La ville, transformée, renaît. Cette conception d'une ville sans architecture est particulièrement emblématique des recherches entreprises par les jeunes architectes autour de 1968, qui repensent entièrement les présupposés de l'architecture (qui serait stable, fixe – et même construite).


- L’architecture du déplacement et de la fragmentation – les années 80 et la Déconstruction

* COOP HIMMELB(L)AU, Open House, 1983
* Bernard TSCHUMI, Parc de la Villette, 1983
* Peter EISENMAN, Guardiola House, 1986-88


- L’architecture fluide – les années 90-2000 et le numérique

* François ROCHE, Acqua Alta, 2000
Ce projet comprend un centre culturel, l’extension de l’école d’architecture, un auditorium, une librairie, une salle de cours, un restaurant et une galerie. Prévu pour un site localisé à Venise sur les embouchures du Lido, de Malamocco et de Chiogga, à l’endroit où les eaux des rivières rejoignent la mer, il est fondé sur l’identité de la lagune : l’eau et les algues, le rythme des marées, la matière liquide, la sédimentation, les couleurs passant du vert au brun. Tous sont enfin intégrés dans le processus même de conception architecturale, dans un scénario en cinq étapes utilisant l’outil numérique pour générer des formes inspirées de mouvements de l’eau.

- Exemples de lieux d’exposition mobiles aujourd’hui

* A-TIPIS à la Villette
Créé à l’initiative de la maison de production belge Victoria et présenté pour la première fois en France, A-TIPIS est un projet itinérant conçu par huit artistes ou collectifs qui se sont penchés sur le thème du «nomadisme contemporain», de l’espace public et de l’errance.
A- TIPIS est une exposition mobile sur le nomadisme contemporain. Un projet à mi-chemin entre arts plastiques et arts scéniques. Une tente familiale géante, une goutte de rosée mécanique, un faux pavillon de banlieue, un espace qui se rétracte quand vous y entrez, un terminal d’aéroport en bâche de camion, sont quelques un des “tipis” atypiques qui apparaîtront par surprise sur le Parc de la Villette. Conçues pour pouvoir être démontées et déplacées en un minimum de temps ces unités mobiles ont été créées par 8 artistes venant de différents pays, qui se sont inspirés du thème du nomadisme. Chaque fois qu’il plante sa tente, le nomade développe des relations et des affinités nouvelles. De même, le public pourra engager une conversation avec les artistes ou être le témoin de l’une des nombreuses performances ayant lieu la journée et le soir.

* Le musée nomade de Shigeru Ban
Shigeru Ban a conçu un musée temporaire et itinérant à l'aide de 148 conteneurs empilés. Des tuyaux de papier recyclé en guise de support, des galets pour tracer les parcours, des cloisons réalisées avec des sachets de thé du Sri Lanka. C'est ainsi que se présente cette structure éphémère, conçue pour être transportée dans le monde entier. Ce musée, qui peut être démonté et rangé dans un nombre réduit de conteneurs en acier, témoigne de l'intérêt porté par cet architecte japonais aux aspects liés aux concepts de durabilité et recyclage. Le Nomadic Museum sera à New York jusqu'au 6 juin 2005 avec l'exposition "Ashes and Snow", dédiée à l'oeuvre de l'artiste canadien Gregory Colbert. C'est par une passerelle en bois, bordée par une cloison semi-transparente réalisée avec un million de sachets de thé pressés, que les visiteurs accèderont à l'intérieur de cette structure tout à fait hors du commun. Les oeuvres exposées sont imprimées sur du papier de pigments végétaux fait à la main au Japon et sont le fruit de 27 expéditions autour du globe visant à interpréter le sens de l'interaction entre l'homme et le monde animal. Au coeur du Nomadic Museum se trouve une bibliothèque flottante dont les murs servent de support pour les images du livre de l'artiste et un film de Colbert est projeté à l'extrémité du musée.

3.2.2 Aspects économiques des lieux d’exposition d’art contemporain mobiles
3.3 ASPECTS REGLEMENTAIRES D’UN LIEU D’EXPOSITION PUBLIC MOBILE
3.3.1 Réglementation concernant les ERP provisoire
3.3.2 Implantation du lieu d’exposition éphémère : la place publique ou le stade














BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages pédagogiques :
-CHALUMEAU (Jean-Luc), Histoire de l’art contemporain, Paris, Edition Klinchsieck, 2005
-DE MAISON ROUGE (Isabelle), L'art contemporain, Paris, Edition Le Cavalier Bleu, 2002
-FRANCBLIN (Catherine), SAUSSET (Damien), LEYDIER (Richard), L'ABCdaire de l'Art contemporain, Paris, Edition Flammarion, 2003
-MONTANER (Josep Maria), Nouveaux musées, espaces pour l'art et la culture, Barcelone, Edition Gustavo Gili, 1990
-WILLEMIN (Véronique), Maisons mobiles, Paris, Editions Alternatives, 2004

Essais :
-BUREN (Daniel), Les écrits, tome 1 : 1965-1976
-GUELTON (Bernard), L'exposition: interprétation et réinterprétation, Paris, Edition L'Harmattan, 1998
-HEINICH (Nathalie), La sociologie de l’art, Paris, Edition La Découverte, 2001
-HEINICH (Nathalie), Le triple jeu de l’art contemporain, Paris, les Editions de Minuit, 1998
-JIMENEZ (Marc), La querelle de l’art contemporain, Paris, Edition Folio essais, 2005
-MOULIN (Raymonde), Sociologie de l’art, Paris, Edition L'Harmattan, 1999
-OUVRAGE COLLECTIF, Qu'attendez-vous d'une institution artistique?, Paris, Palais de Tokyo, 2001
-OUVRAGE COLLECTIF, Quel est le rôle de l’artiste aujourd’hui?, Paris, Palais de Tokyo, 2001
-OUVRAGE COLLECTIF, L’art peut-il se passer de commentaires ?, Ouvrage publié à l’occasion du colloque éponyme par le Mac/Val en 20006
-SOMMIER-PAGE (Dominique), DE BARY (Marie Odile), Scénographier l’art contemporain, Lyon, Presse Université de Lyon, 1988
-VANDER GUCHT (Daniel), L'art contemporain au miroir du musée, Paris, Edition La lettre volée, 1998
-VINCON (René), Artifices d'exposition, Paris, Edition L'Harmattan, 1999

Revues :
-ARDENNE (Paul), Art et mobilité : quand trop bouger ne déplace plus rien, Visuel Revue d’Art Rouen, n°7 et 8 Automne/hiver 1999
-BOISSIÈRE (Olivier), Portrait. Frank O. Gehry, incluant une analyse de l'oeuvre de Gehry par Jean-Louis Cohen, dans L'Architecture d'aujourd'hui, n° 261 février 1989, Cahier Thème, p. 2-41.
-DESMOULINS (Christine), Musée Guggenheim de Bilbao, dans Architecture intérieure, n°279, p.94-101.
-DE WAVRIN (Isabelle), Musée DIA : Beacon-l’art XXL dans Beaux-Arts magazine, n°230 juillet 2003
-GIRARD (Christophe), Herzog et De Meuron les architectes du stockage dans Beaux-Arts magazine, n°230 juillet 2003, p. 58-61
-GOODMAN (Nelson), La fin du musée? dans Esthétique et connaissance, Cahors, Edition l’Eclat, 1990
-LASNIER (Jean-François), Beaubourg au pays du consensus roi dans Beaux-Arts magazine, n°234 novembre 2003, p. 16-18
-MOULIN (Raymonde), Le Musée d'art contemporain et le marché dans L'Art contemporain et le musée
-ROULET (Sophie) et SOULIE (Sophie), Toyo Ito, l’architecture de l'éphémère, Paris, Le Moniteur
(Monographies d'architecture), 1991
-ARTICLE COLLECTIF, Propos mobiles Exposition 24/10-15/11 / Projet 10, Beaux Arts magazine, Paris, 1998

Sites Internet :
-http://www.asymptote-architecture.com/
-http://www.archigram.net
-http://www.benaym.com/
-http://www.diabeacon.org
-http://www.mamco.ch
-http://www.palaisdetokyo.com
-http://www.schaulager.org
-http://www.frac-centre.asso.fr/
-http://www.whitecubes.org